Le raton gros comme un camion de Marie-Odile Judes

 

Simon était un raton qui adorait les câlins. Seulement, voilà… Simon était gros comme un camion et rond comme un melon.

Chaque fois qu'il voulait grimper sur les genoux de sa maman, elle le repoussait en lui disant:
"Voyons, Simon, tu es bien trop gros!"

Et chaque fois qu'il voulait sauter dans les bras de son papa, celui-ci se fâchait:
"Non, Simon, tu vas m écraser!"

Et Simon rêvait qu'il n'était pas plus gros qu'un champignon.

Un matin, alors qu'il regardait d'un air désolé son derrière gros comme un camion, Simon s'écria:
"Allons voir Mauriçon 1'ourson, Yvette la chouette et Charlotte la marmotte. Ils me diront comment devenir tout petit, petit!"

Simon fila d'abord chez Mauriçon, qui buvait du jus de citron allongé sur son paillasson.
"Quel bon vent t'amène? demanda celui-ci.
- Euh, dis-moi donc comment devenir petit comme un champignon!" répondit Simon.

Mauriçon éclata de rire:
"Un champignon? Pourquoi pas un limaçon?
- Tu n'es pas drôle"! grogna Simon.

Mauriçon se calma et hocha la tête:
"Mon pauvre Simon, je ne peux pas t'aider. Enorme tu es, énorme tu resteras!"

Simon se mit à pleurer, car il avait cru que Mauriçon pourrait lui donner la recette qui transforme les gros ratons en ratons maigrichons.

Mais Mauriçon n'était pas un sorcier. Il n'était qu'un ourson pâlichon, qui buvait du jus de citron et reprisait ses caleçons avec du fil de coton.

Le raton quitta l'ourson, l'air grognon, et se rendit chez Yvette, qui tricotait de la layette assise dans une brouette.
"Bonjour, Yvette, cria Simon. Que faire pour devenir aussi petit qu'un champignon?
- Eh bien, dit Yvette, mange donc du potiron, mon petit trognon!"

Simon ouvrit des yeux ronds:
"Beurk! Le potiron, ce n'est pas bon!»

Il se dit qu'il avait été bien bête de venir voir Yvette. Elle n'était qu'une chouette qui lavait ses chaussettes avec du savon en paillettes.

Simon s'en alla chez Charlotte, qui astiquait ses bottes devant sa paillote. Mais Il était si gros, si lourd, qu'en passant sur un petit pont, il fit craquer les planches et plouf! il se retrouva dans l'eau peu profonde et boueuse.

"Hou, que tu es sale! s'écria Charlotte, en le voyant arriver tout crotté.
- Pas grave, pas grave, marmonna Simon.
- Oh toi Ça n a pas l'air d'aller!" dit Charlotte.

En pleurant, Simon lui dit:
"Non, ça ne va pas! Personne ne peut me dire cc que je dois faire pour devenir petit comme un champignon!"

La marmotte posa ses bottes et demanda:
"Et pour quelle raison un champignon, mon garçon?
- Si j'avais la taille d'un champignon, expliqua Simon mes parents me feraient des baisers bons comme des macarons".

Charlotte, qui n'était pas sotte lui dit:
"Puisque tes parents ne peuvent pas te porter, porte-les, toi! Ainsi ils pourront t'embrasser sans être écrasés!
- Bonne idée! Tu es une fée!" s'écria Simon, tout joyeux.

Non, Charlotte n'était pas une fée. Elle, n'était qu'une marmotte qui croquait des carottes en astiquant ses bottes.

Le raton rentra chez lui en hâte. Ses parents jouaient au ballon devant la maison. Hop! Simon mit son papa dans sa patte droite, et hop! sa maman dans sa parte gauche. D'une voix aimable, il leur demanda:
"Un câlin, je vous prie!"

Ses parents l'embrassèrent, le caressèrent, le dorlotèrent. Smac! Smac! Smac! Smac! Ce fut le plus beau des câlins!

Maintenant, quand Simon réclame des baisers ses parents ne se font plus prier: hop! ils sautent dans ses pattes et lui font des bisous doux… comme des roudoudous.